La base d’une maison qui consomme peu d’énergie est un bâtiment bien orienté par rapport au soleil ainsi qu’une  enveloppe bien isolée et bien étanche. La maison d' Alain Hamel respecte haut la main ces critères. Visant le label allemand Passivhaus, la résistance et l’étanchéité atteignent des valeurs record. Voici les détails.

Une conception solaire passive

La maison d’Alain Hamel est solaire passive. Elle a été conçue pour profiter au maximum de la chaleur du soleil, afin de réduire sa consommation d’énergie liée au chauffage.

Le débord de toit

Débord de toit de la maison Kénogami - Ronan Jouve, Écohabitation
Débord de toit de la maison Kénogami © Ronan Jouve, Écohabitation
  • Le schéma ci-dessus, et photo ci-contre, montrent l’effet des débords de toit sur la maison. La plus grande partie des fenêtres est située du côté Sud de la maison car c’est là que le gain solaire est maximal au cours d’une journée. Le vitrage a été soigneusement sélectionné pour permettre le maximum de gains solaires au sud mais une résistance thermique maximale pour les autres orientations.
  • Des débords de toit, ainsi que des volets roulants ont été installés pour éviter  les surchauffes l’été, et profiter de toute la chaleur du soleil l’hiver. 
  • Grâce à l’angle imposé par le débord, les rayons du soleil n’atteignent pas le vitrage à 13h (midi solaire) le 21 Juin (la journée la plus chaude), et au contraire ils couvrent complètement la façade le 21 décembre à 12h, là où la maison a le plus besoin de chauffage. 
Utilité des débords de toit - Lucie Langlois, Alias Architecture
Utilité des débords de toit © Lucie Langlois, Alias Architecture

Le mur intérieur stockeur de chaleur

La maison dispose d’un mur de brique intérieur stockeur de chaleur (d’une épaisseur de 10 pouces), de seuils de fenêtres en béton et d’un plancher de béton, afin d’avoir une bonne masse thermique et de stocker la chaleur solaire à l’intérieur de la maison sans subir de surchauffe excessive.

Mur de briques stockeur de chaleur - Ronan Jouve, Écohabitation
Mur de briques stockeur de chaleur © Alain Hamel, Écohabitation

La masse thermique d'un bâtiment fournit de l'inertie thermique, qui représente la résistance du matériau aux fluctuations de températures lorsqu'il reçoit un apport d'énergie. Elle est liée à la capacité d’un matériau à emmagasiner de la chaleur sans changement majeur de la température environnante. Les matériaux massiques comme le béton, la brique, ou la fonte ont une bonne masse thermique. Cela permet d’atténuer les variations fortes de températures dans une maison. Ces matériaux vont permettre d’emmagasiner la chaleur du soleil afin de de la restituer dans la maison progressivement.

Une toiture anti-îlot de chaleur en acier blanc

La maison dispose d’une toiture en acier Galvalume. Ce matériau, du fait de sa couleur et de sa texture, a une propriété réfléchissante très importante. La toiture va donc réfléchir une grosse partie du rayonnement solaire qui va lui arriver. Cet acier va donc protéger la toiture du rayonnement UV mais aussi contribuer à réduire la température autour de la maison.Une grande part du rayonnement réfléchi sera situé dans la partie visible du spectre, laquelle n'est pas sujette à la problématique de l'effet de serre.

Ronan Jouve, Écohabitation
© Ronan Jouve, Écohabitation

Une enveloppe efficace

Zoom sur la résistance de l'enveloppe - Lucie Langlois, Alias Architecture
Zoom sur la résistance de l'enveloppe © Lucie Langlois, Alias Architecture

La maison d’Alain présente une grosse épaisseur d’isolant à l’extérieur des murs. Le fait de placer des matériaux isolants à l’extérieur de la structure en bois permet de supprimer les «ponts thermiques» dus à l’ossature (montants de bois). En effet, le bois présentant une valeur de résistance moins élevée que les matériaux isolants, s'il n’y avait pas d’isolation du coté extérieur, la chaleur s’engouffrerait par les montants de bois pour s’échapper de la maison (ce sont les ponts thermiques). Et de ce fait, la facture de chauffage augmenterait.

L’épaisseur des matériaux isolants est très élevée, afin d’avoir une enveloppe du bâtiment pour éviter que la chaleur ne s’échappe. Plus l’isolant est épais, moins la chaleur de la maison en hiver ne va sortir à l’extérieur. En été c’est également bénéfique, une grosse épaisseur d’isolant empêchera la chaleur de rentrer dans la maison.

L’étanchéité à l’air et à l’eau des parois du bâtiment est très importante. Le test d’infiltrométrie de sa maison donne une valeur de 0.56 CAH (taux de changement d’air par heure lorsque la maison est soumise à une pression de 50 Pascals) alors que la moyenne québécoise est de 3.22 CAH (Mario Canuel dans la Maison du 21è Siècle). Ce qui veut dire que la maison d’Alain laisse passer six fois moins d’air qu’une maison québécoise moyenne ! Le Code de construction du Québec, lui, n'impose aucune contrainte en termes de performance d'étanchéité.

Toutes ces mesures permettent de réduire au maximum les pertes de chaleur à travers les parois du bâtiment d’Alain. Voici le détail de la composition des parois du bâtiment d’Alain.

Détails de la composition des parois

Nous vous présentons ici la composition des parois du bâtiment vue à la loupe ! Rien n’y échappe; la fondation, l’ossature et l’isolation des murs, du toit et du sol, les finitions intérieures et extérieures. Les murs de fondation sont en béton armé (épaisseur de six pouces) avec un coffrage isolant qui va minimiser les pertes thermiques au niveau du périmètre de fondation.

La dalle de béton contient 30% d’ajout cimentaire recyclé.

Construction de la fondation - Alain Hamel, Écohabitation
Construction de la fondation © Alain Hamel, Écohabitation

Une ossature des murs performante

Les murs extérieurs sont en ossature bois avec des panneaux de bois orientés «OSB» (Oriented Strand Board) qui sont des panneaux composés de copeaux de bois orientés d’une certaine façon, plus résistants que des panneaux contreplaqués. L’isolation est de type « Remote wall » (« Residential Exterior Membrane Outside Insulation Technic).

Vue sur les murs de la maison - Alain Hamel, Écohabitation
Vue sur les murs de la maison © Alain Hamel, Écohabitation

Cette technique a été développée par le CCHRC (Cold Climate Housing Research Center). Elle consiste à placer une quantité considérable d’isolant rigide à l’extérieur de la structure des murs, cela permet d’éviter toute condensation dans les murs (et donc éviter la moisissure). En effet comme l'épaisseur d’isolant est très importante, le point de rosée (soit la température à laquelle la vapeur d'eau se condense) ne sera jamais atteint à l'intérieur du mur, car la température y restera toujours assez élevée pour que la vapeur d’eau contenue dans le mur ne se condense pas.

Une isolation et une étanchéité hors du commun

Le toit

  • Valeur de résistance thermique : R 151
  • Membrane d’Étanchéité
  • Panneaux isolants rigides en polyisocyanurate «Enerfoil» de «Iko», polyuréthane giclé dans les bouts pour sceller les ponts thermiques
  • Cellulose soufflée 36’’

Murs en contact avec l’extérieur           

  • Valeur de résistance thermique R 80
  • Isolation intérieure en natte de laine de roche «Comfortbatt de Roxul»
  • Membrane d’étanchéité à l’extérieur des panneaux OSB
  • Isolation extérieure en panneaux de polystyrène premium rigide entouré de panneaux de polystyrène expansé «Isofix 160» de «Isolofoam»

Fondations       

  • R64 sous la dalle - R83 périmètre de fondation
  • Coffrage isolant rigide polystyrène expansé Nudura 4’’
  • Panneaux 6’’ de polystyrène expansé haute densité contre le coffrage côté intérieur et sur le sol de pierre
  • Polyuréthane giclé 2 ‘’entre le sol de fondation en béton et les panneaux de polystyrène 12’’
  • Membrane d’étanchéité à l’extérieur

Des finitions intérieures issues le plus possible de matériaux locaux

  • Les finitions des murs ont été effectuées avec du gypse.
  • Le plancher du rez-de-chaussée est en béton poli au diamant avec du verre recyclé fabriqué localement et un scellant à base de silicone.
  • Les plafonds sont en bois (mélèze + poutres en pin issus des forêts de la région) ou en plâtre.

Des fenêtres hyper-performantes

Le choix des fenêtres a été rigoureusement étudié. Elles sont caractérisées par leur basse émissivité (Low E) ce qui signifie qu’elles empêchent au maximum la transmission de chaleur par rayonnement. Des fenêtres ayant une valeur de résistance au transfert de chaleur élevée (ce qui limite au maximum les pertes de chaleur) ont été placées au nord et à l’ouest, là où le bilan énergétique des fenêtres est négatif (plus de pertes que de gains solaires).

 

Zoom sur le montant d'une fenêtre sud © Ronan Jouve, Écohabitation
Zoom sur le montant d'une fenêtre sud © Ronan Jouve, Écohabitation

Pour le côté sud, les fenêtres ont une résistance thermique un peu moins élevée, mais un « coefficient d’apport par rayonnement solaire » (SHGC, acronyme en anglais) plus important. Ici le bilan est carrément positif: plus de gains solaires que de pertes de chaleur. 

La valeur U représente le transfert de chaleur. Plus U est petit, moins la chaleur passe.

  • Façade côté sud                             U de 0,74 W/(m2-C) – SHGC de 0,56

Fenêtres triple vitrage avec double intercalaires Thermal Edge et lames d’argon (95%), verres intérieur et extérieurs Low-E180

  • Façade côté ouest et nord         U de 0,72 W/(m2-C) – SHGC de 0,37

Fenêtres triple vitrage avec CaloriVerre et verre intérieur Low-E272

Le “CaloriVerre” est le premier vitrage vraiment “énergétique”. Ce vitrage permet d'obtenir une valeur isolante supérieure à celle d'un vitrage triple tout en conservant le poids d'un vitrage double.

Il est intéressant de préciser que ces fenêtres de fabrication canadienne n’étaient pas à la hauteur des besoins d’une maison qui prétend à la certification Passivhaus. Alain Hamel a du introduire dans les cadres de l’isolant polyuréthane.

Des portes isolantes

Portes et cadrages en fibre de verre double-vitrage , intercalaire Thermal Edge + gaz Argon, verre intérieur Low-E

Revêtement extérieur : des matériaux variés, locaux et soigneusement répartis

  • Murs : parement de pierre Rinox (brique de béton charcoal) sur 3 pieds depuis le bas de la maison + allège de couleur assortie
  • Toiture en acier blanc Galvalume
  • Cuisine d’été en bois local, poutres et poteaux (brun foncé) avec planches emboutées
  • Portes et fenêtres : tous les cadres des portes d’accès, garage et fenêtres en acier couleur argent.
  • Volets motorisés Alvia pour se protéger du froid mais aussi de la chaleur.
  • La partie haute des portes est recouverte d’un revêtement en acier galvanisé
  • Soffite (revêtement du dessous du débord de toit) en bois assorti et muni d’un profilé métallique de ventilation et d’un fascia (élément vertical entre le toit et le Soffite) en Galvalume
  • Cheminées en Galvalume avec le dessus en acier inoxydable
  • Le reste du revêtement est en mélèze brun foncé.
Le revêtement extérieur et la porte © Ronan Jouve, Écohabitation
Le revêtement extérieur et la porte © Ronan Jouve, Écohabitation

On voit que pour prétendre au label Passivhaus dans un climat comme celui du Saguenay, des valeurs extrêmes de résistance thermique et d’infiltrométrie doivent être atteintes. Des sondes de températures, d’humidité et d’irradiation solaire ont été implantées dans l’enveloppe et autour du bâtiment et seront analysées par la chaire TERRE du Cégep de Jonquière. On attend avec impatience les analyses… qui donneront des indications sur la performance du Remote Wall, sur l’incidence du vieillissement de l’isolant, sur la qualité de l’air intérieur ou encore sur les effets du rayonnement solaire sur la masse thermique.

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