Côte-des-Neiges, dans une cour verdoyante, une grande terrasse en cèdre. La ressemblance avec d’autres cours s’arrête là : sur la terrasse de Marie-Michèle trône une élégante serre d’aluminium et de verre trempé, pensée pour y cultiver des fruits et légumes, 10 à 12 mois par année, et élever des poissons d’eau douce.
Avec ce potager couvert qui donne des airs de jardin botanique au coin de la rue, Marie-Michèle réalise le rêve de cultiver en famille une grande variété de produits, facilement et de manière on ne peut plus locale. C’est la compagnie Myfood, basée dans l’Est de la France, qui lui a permis de réaliser son projet : Myfood propose des serres clés en main connectées, avec un grand choix d’options. La compagnie québécoise Aéronergie, spécialisée en efficacité énergétique l'a installé chez Marie-Michèle. Intrigués ? Lisez la suite, Marie-Michèle nous partage en détails son aventure de jardinière qui ne fait que commencer.
Serre en kit 4 saisons : le style, à l’épreuve du temps
Spacieuse, la serre aquaponique de Marie-Michèle offre une hauteur de 6’ 6’’ et sa superficie de 240 pieds carrés environ permet d’accueillir de nombreux bacs au sol, des tours pour la culture verticale et des bassins pour les poissons. Il reste même de la place pour aménager un espace détente : « une chaise et une table invitent à profiter de l’ambiance zen et tropicale de l’endroit », commente Marie-Michèle. D’ailleurs, étant donné que la cour donne sur un coin de rue très passant, la serre attire de nombreux compliments des passants.
Pour contrôler la chaleur et l’humidité de la serre, un système de ventilation électrique fonctionnant de concert avec quatre lucarnes à ouverture automatique assure une bonne régulation de la température. Le système de doubles portes coulissantes avant et arrière, équipées de portes moustiquaires vient en renfort en créant un courant d’air. En complément, une toile d’ombrage amovible, installée au sommet de la structure à l’intérieur, permet d’éviter que les plantes ne surchauffent.
Comment fonctionne la serre en hiver ? 10 à 12 mois de culture au Québec, ça se prépare ! Pour assurer que la température intérieure ne descende pas sous les 10-12 °C, un système de thermopompe hybride solaire et électrique économe en énergie a été installé. Pour limiter les pertes de chaleur, des panneaux isolants sont prévus pour la face nord : en double polycarbonate transparent, ils n’empêchent pas la lumière de pénétrer dans la serre. Le plancher a également été isolé.
De plus, les bassins à poissons accumulent la chaleur du soleil pendant la journée pour la redistribuer la nuit. Des chauffe-eau électriques jouent un rôle d'appoint uniquement. Pour compenser les heures réduites d’ensoleillement en hiver, un dispositif d’éclairage horticole, vertical et horizontal, placé à côté des tours et des bacs de permaculture, permet d’assurer les conditions idéales de croissance à une grande variété de fruits et de légumes. La neige ne posera pas de problème : la structure est en aluminium et est ancrée à la terrasse, elle-même fixée au sol avec des pieux vissés.
La serre a été installée par Aéronergie, le partenaire officiel de Myfood au Québec.
Aquaponie et permaculture en bacs : un système de production alimentaire en circuit fermé qui donne de bons résultats
Les nombreux équipements de culture livrés avec la serre en kit offrent une base complète pour d’abondantes cultures :
- 24 tours de culture verticales. Chaque tour peut contenir de 3 à 8 plants chacun, selon la plante
- 5 bacs de permaculture auto-irrigants pour culture en terre (autonomie en eau de 2 à 3 semaines)
- 2 bassins de 600 litres d’eau chacun, pour accueillir les poissons, dotés d’un distributeur automatique de nourriture
- 1 système de jardinage vertical supplémentaire, autonome, avec pompe et 36 espaces supplémentaires pour cultiver en bioponie
Pour assurer l’environnement symbiotique, principe de base de l’aquaponie, le cycle fermé entre végétaux, poissons et bactéries est réalisé par un système de pompage et de tuyauterie qui redistribue l’eau aux plantes installées dans les tours. L’eau filtrée par un système UV qui capte au passage les plus gros déchets, nourrit les plantes de manière biologique puisqu'elle est enrichie des déjections de poissons, puis s’écoule ensuite directement dans les bassins. Et le cycle recommence.
Quels légumes faire pousser dans ce type de serre ? À peu près tous ! Les tours et bacs accueillent depuis l’installation de la serre, début mai, une belle liste de végétaux.
Dans les tours :
- 16 plants de tomates
- 8 plants de piments
- 20 salades
- 24 plants de fraises
- 6 plants de framboises
- 4 plants de fèves
- 3 plants d’épinards
- Beaucoup de fines herbes
Dans les bacs :
- 3 plants de tomates
- 3 plants de chou-fleur
- 2 plants de cerises de terre
- 4 plants de concombres
- 6 plants de céleris
- Une dizaine d’oignons blancs / Une dizaine d’oignons verts
- 3 plants de melons d’eau
- 3 plants de cantaloups
- 3 plants de choux de Bruxelles
- Quelques carottes et betteraves, qui ont toutefois eu du mal à pousser
Il est possible de faire pousser à peu près tout pendant les saisons plus « chaudes » (printemps/été/automne) alors que l’hiver, la culture se limite plutôt aux légumes « feuilles » (salade, épinard, chou kale, chou-rave, chou, blette, céleri, etc.), aux légumes « racines » (oignon, carotte, radis, navet, etc.) et aux fines herbes.
Les bassins ont pour l’instant été remplis de poissons rouges, choisis pour leur résistance aux variations de température et de ph. Marie-Michèle explique son choix : « Éventuellement, lorsque nous serons plus expérimentés et que nous aurons un meilleur contrôle de nos paramètres, nous pourrons avoir des truites pendant l’hiver et des tilapias pendant l’été, ou encore des carpes ou des perchaudes. Nous pourrions alors consommer nos poissons ! » Myfood recommande effectivement de passer par une période de rodage car les poissons comestibles sont moins résistants.
La serre connectée : l’intelligence artificielle au service de l’autoproduction
La serre Myfood a été conçue pour permettre « une production ultra-fraîche toute l'année à domicile, avec 1h30 d'entretien par semaine », se basant sur la technologie pour accompagner les maraichers en herbe dans leur expérience. Les équipements intégrés dans le concept, comme des capteurs de température, d’humidité de l’air et de ph de l’eau, relayent l’information collectée dans un boitier de mesure. Suite à l’analyse de celles-ci et selon les besoins, des agronomes employés par Myfood soutiennent et conseillent les utilisateurs pour optimiser la récolte ou la maintenance. Bref, une version ultra techno de l’almanach des fermiers !
Pour aller encore plus loin, le système exploite l’intelligence artificielle et prévoit que « l’ensemble des serres échangent des informations et tissent une véritable base de connaissance ». Avec le temps, les modèles s’affinent et permettent une meilleure gestion du quotidien des serres.
Les technologies intelligentes utilisées sont efficaces tout en étant extrêmement simples : tout cela dans l’optique d’accélérer à puissance grand V l’apprentissage collectif et la rentabilisation le plus possible des espaces de culture. La technologie joue ainsi un rôle clé pour accompagner le cultivateur de manière personnalisée et atteindre de bons rendements beaucoup plus rapidement.
Avec la contribution enthousiaste de toute la communauté des utilisateurs des serres Myfood, être débutant en autoproduction maraichère n’est plus une contrainte. L'intelligence artificielle nous amène loin du simple potager urbain collectif où voisins s’entraident et partagent leurs récoltes, mais la participation à une communauté de jardiniers connectés offre une expérience enrichissante et fascinante dans son concept. Par exemple, les solutions développées par un autre propriétaire de serre sont intégrées dans le système et rediffusées auprès des autres cultivateurs. De son côté, l'entreprise Myfood fait de l'amélioration continue de ses produits sur base des commentaires de ses clients connectés, tout cela en l’espace de quelques mois !
« Honnêtement, je trouve cela super de joindre une communauté avec ce projet, je me sens moins seule dans mes premiers pas avec la serre ! », commente Marie-Michèle. Elle apprécie aussi beaucoup les recherches et développements continus de l’équipe Myfood pour augmenter les rendements, gérer les nuisibles, améliorer les équipements, au bénéfice de tous les propriétaires de serre actuels et futurs.
Retour d’expérience et verdict d'Écohabitation sur la serre en kit
Une serre en kit clé en main
Une serre en kit clé en main, installée et fonctionnelle au premier jour : une formule très appréciable quand on a une famille et qu’on manque de temps. « Je n’ai pas eu à courir au magasin pour acheter de la terre, des billes d’argiles, des tuyaux, des chauffe-eaux, etc. : presque tout était fourni et très bien planifié pour nous faciliter la vie. » Même si la commande de certains équipements supplémentaires a été longue et dispendieuse comme Myfood est basée en Europe, Marie-Michèle est très satisfaite.
Des avantages intéressants mais pas pour tous les budgets
La question de l’investissement financier est importante. Même si Marie-Michèle recommande cette serre en kit de qualité, et garantie 12 ans, elle avertit qu’un bon budget est nécessaire. « Selon les options et équipements complémentaires choisis, il faut s’attendre à devoir débourser entre 15 000 et 25 000 $ pour ce modèle de serre, incluant l’installation, le transport et les frais de douanes ».
Les autres modèles de serres présentés sur ce site Web ont coûté entre 300 $ et 3 000 $ à leur propriétaire. Avec cette serre en kit connectée, on ne joue pas dans la même ligue : il s'agit d'un type très perfectionné et tout inclus. Certes, ses avantages sont de taille :
- La structure et le vitrage sont durables et risquent peu d'être altérés par le temps, contrairement aux grandes bâches de polyéthylène et aux arceaux de métal ou de plastique habituellement utilisés pour des serres plus artisanales
- Les systèmes de chauffage et de ventilation permettent de prolonger la saison des cultures jusqu'à 10 à 12 mois ! Ils s'accompagnement tout de même d'un coût énergétique non négligeable.
- Les bassins et tours adaptés à l'aquaponie offrent la possiblité de consommer du poisson élevé à très petite échelle, à la maison. Une possibilité assez rare !
Ces éléments, vendus sans la technologie, auraient été plus abordables. Nous nous posons donc la question : dans quelle mesure la détection à distance, l'utilisation d'une application et le recours à l'intelligence artificielle sont-ils nécessaires pour la culture de fruits et légumes en serre ? Selon Écohabitation, l'impact environnemental lié à cette technologie aurait pu être évité.
Une expérience d'agriculture urbaine de qualité
Outre des récoltes généreuses qui permettront quelques économies à la famille pendant des dizaines d’années, c’est l’expérience de culture et la facilité à cultiver ses propres fruits et légumes qui ont attiré Marie-Michèle : « c’est extrêmement enrichissant. (…) Et les bacs et les tours limitent de beaucoup l’entretien : pas de désherbage, beaucoup moins de nuisibles et maladie, tout s’arrose tout seul… ».
Évidemment, l’apprentissage de la culture, ainsi que de l’utilisation de l’application en ligne est un passage obligé : « j’ai trouvé ce premier été avec la serre assez rock and roll et exigeant en termes de temps (3 à 5h / semaine, [au lieu des 1h30 annoncées par la compagnie]) car tout était nouveau pour moi, donc plus long, nécessitant de nombreuses recherches, de nombreux essais et erreurs, etc. ».
« Bien que ce concept nous facilite beaucoup la vie, cela reste du jardinage, ce qui signifie qu’il faut prendre des centaines de microdécisions par saison sur une multitude de sujets […]. Mieux vaut s’attendre à sortir un peu de sa zone de confort! ». À bon entendeur!
Considérant tous ces paramètres, Marie-Michèle conseille sa serre en kit 4 saisons « à tous ceux qui veulent se lancer dans un projet de serre en bioponie ou en aquaponie et qui désirent profiter d’une solution clé en mains qui leur facilite beaucoup la vie ».
Attention à la réglementation municipale pour une serre de jardin
La production et l'élevage en milieu urbain relèvent des règlements d’urbanisme de la municipalité. Chaque municipalité possède ses propres règlements de zonage. Pourquoi réglementer l'agriculture urbaine ? Car cela permet de bien gérer les nuisances liées à certaines pratiques, et ainsi préserver une bonne cohabitation entre les citoyens (nous vous parlions de cet enjeu dans notre article sur l'élevage des poules en ville).
Ainsi, l’implantation d’une serre demande parfois un permis. Par exemple, selon les règlements d’urbanisme de l’arrondissement de Côte-des-Neiges-Note-Dame-De-Grace, une serre privée est considérée comme une dépendance, au même titre qu’un cabanon par exemple. Si la serre fait plus de de plus de 15 m2, demander un permis est obligatoire.
De plus, la localisation de la serre dans la cour doit respecter les prescriptions, même si c’est au détriment de l’ensoleillement ! En plus de décrire les usages qui sont permis dans chaque zone de la ville, les règles de zonage précisent les dispositions à respecter : implantation de la serre sur le terrain, distance avec l'habitation et avec le terrain voisin, hauteur de la structure...
Prenez donc le temps de vous renseigner sur l’aspect réglementaire de l'agriculture urbaine avant de vous lancer. Car même si les règlements peuvent évoluer avec le temps, comme le droit de cultiver un potager en façade de terrain dans plusieurs municipalités québécoises, mieux vaut éviter toute mauvaise surprise. Consultez notamment la fiche réalisée par le Laboratoire sur l’agriculture urbaine (AU/LAB), un laboratoire montréalais de recherche, d’innovation et d'intervention en agriculture urbaine. Ce document recense les villes (ou arrondissements) qui le permettent l'implantation d'une serre urbaine, ainsi que les contraintes urbanistiques incluses dans chaque règlementation.
Production ultra locale et consommation d'énergie
Si l'autoproduction alimentaire représente une option très avantageuse sur le plan écologique, il nous faut toutefois considérer la consommation énergétique des serres dans notre climat hivernal. Si les serres froides, peu ou pas chauffées n'occasionnent aucune dépense, il existe des serres chauffées mettant à profit une source d'énergie résiduelle ou revalorisée. Citons l'exemple des serres Lufa, des structures chauffées par bâtiments sur lesquelles elles sont installées, ou encore des serres chauffées par la biomasse produite par le compst ou le résidus végétaux de la ferme.
Étant donné que l’électricité utilisée pour la pompe est négligeable (comme un filtreur d’aquarium) et que les lucarnes à ouverture automatique fonctionnent sans électricité, le chauffage par thermopompe et les chauffe-eau pour les bassins occasionneraient une consommation électrique hivernale, dans le cas où l'on souhaiterait produire à la saison froide. Certes, l'isolation et la masse thermique créée par la serre peuvent jouer un rôle important dans la conservation de la chaleur à l'intérieur. Et il est clair que l'hydroélectricité alimentant les installations provient de source renouvelable, ce qui est nettement plus positif que la plupart des serres agricoles du Québec, souvent alimentées au gaz. Si la serre n'est exploitée du printemps à l'automne, alors sa consommation énergétique sera à peine plus élevée qu'une serre chauffée classique.
Il est donc difficile d'évaluer si les légumes et poissons de la serre 4 saisons sont plus avantageux d'un point de vue environnemental que les légumes biologiques achetés à l'épicerie. Nous n'avons pas d'analyse de cycle de vie pour donner ici une réponse, mais considérant les intrants et sortants énergétiques, il pourrait y avoir une demande en électricité plus importante pendant les 3 mois les plus froids (et donc période de pointe), qui pourrait rendre plus pertinent l'achat local transporté par camion. Il pourrait être pertinent de mettre en veille la serre pendant cette période. Les coûts énergétiques en conditions hivernales restent en point d'interrogation donc : si Marie-Michèle expérimente la gestion de sa serre cet hiver, nous la recontacterons au printemps prochain pour en savoir plus !
Commentaires (0)
Inscrivez-vous pour commenter