De plus en plus de Québécois achètent une voiture électrique ou hybride. La règlementation électrique s'adapte à cette nouvelle réalité et les solutions technologiques offrent une réponse à toutes les configurations, même dans les copropriétés. Nous vous avons parlé dans un précédent article des différents produits qui existent pour recharger son auto électrique dans les multilogements.
Et du point de vue juridique? Si connecter une borne électrique dans une maison unifamiliale coule de source, dans une copropriété la question est plus complexe. Outre la configuration des lieux, il faut régler la question légale.
L’article qui suit est paru dans le magazine CondoLiaison, la revue d’information du Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec (RGCQ*), en hiver 2017.
Le saviez-vous?
Pour qu’un syndicat puisse procéder à des travaux d’amélioration dans la case de stationnement d’un copropriétaire, à la condition qu’elle soit désignée comme une partie commune ou une partie commune à usage restreint, il faut obtenir un vote favorable à la double majorité en assemblée générale.Non seulement une majorité des copropriétaires en nombre est requise, mais également 75 % des voix de tous les copropriétaires.
Installation d'une borne: des conducteurs témoignent
« Le sujet est d’actualité, car depuis quelque temps, certains copropriétaires éprouvent des difficultés à installer une borne de recharge dans leur case de stationnement », fait remarquer Émery Brunet, notaire au cabinet de Grandpré Joli-Coeur. Le chroniqueur et ex-coureur automobile, Jacques Duval, a éprouvé quelques difficultés avec son syndicat lorsqu’il a fait l’acquisition d’une Tesla P85D, entièrement électrique. Finalement, ses administrateurs lui ont permis d’installer une borne, à même sa case de stationnement, mais à ses frais.
Un autre copropriétaire qui roule en véhicule hybride a dû signer une convention pour utiliser une prise électrique qui fournit 120 volts d’énergie. Cette prise fait normalement office de chauffe-moteur. Il a pu conclure ce pacte avec son syndicat, moyennant le paiement d’une somme d’argent annuelle qui s’ajoute à ses frais de condo.
Ententes individuelles: l'erreur
« Ce type d’entente est à éviter, car il sera difficile d’établir la consommation annuelle du véhicule électrique. Soit son propriétaire paiera trop cher, soit son syndicat ne percevra pas les tarifs réels qui lui sont dus. L’une des deux parties risque de ne pas y trouver son compte », prévient Émery Brunet. Est-ce qu’il vaut mieux conclure ce type d’arrangement que de ne rien obtenir? « Un syndicat n’est pas là pour mettre des bâtons dans les roues d’un copropriétaire, rappelle Émery Brunet. Si tel est le cas, ce dernier aurait tout intérêt à tenter d’élire un nouveau CA, lors d’une assemblée générale annuelle, ou à convaincre son syndicat du bien-fondé de sa démarche. »
Malheureusement, un flou juridique subsiste en copropriété à propos des bornes de recharge. La plupart des déclarations de copropriété n’ont rien prévu sur cette question. Advenant qu’un syndicat de copropriétaires refuse d’accommoder le conducteur d’un véhicule électrique, on ne peut pas y faire grand-chose. « C’est lui qui a le dernier mot, bien que les syndicats de copropriétaires québécois soient de plus en plus sensibles à cette nouvelle réalité », indique pour sa part l’avocat Raymond Hébert, lui aussi à l’emploi du cabinet de Grandpré Joli-Coeur.
Modification d'une déclaration de copropriété
Cependant, les syndicats qui veulent coopérer peuvent procéder à la modification partielle de leur déclaration de copropriété (Acte constitutif). « On y désignera comme parties communes les nouveaux équipements destinés à ces véhicules, dont le panneau électrique principal qui alimentera les bornes de recharge », explique Émery Brunet. D’autres parties communes à usage restreint seront également créées. Il s’agit habituellement du câblage, qui fait le lien entre le panneau et la borne elle-même.
Lorsque l’espace de stationnement visé est désigné comme une partie privative, la borne de recharge le sera également.
L’Acte constitutif comprendra, en outre, des clauses relatives à la répartition des charges inhérentes aux infrastructures électriques. Elles préciseront qui devra payer pour les entretenir, les réparer ou les remplacer. Le CA se verra attribuer des pouvoirs spéciaux, qui éviteront d’avoir à retourner en assemblée générale, chaque fois que des travaux devront être réalisés. « Dans le cas du panneau électrique principal, les frais d’installation qui en découlent seront assumés par tous les copropriétaires, car il a le potentiel d’être un jour utile à tous », précise Émery Brunet.
L’électrification totale des véhicules routiers n’est peut-être pas pour demain, mais plusieurs experts s’entendent pour dire que d’ici quelque temps, le processus sera bel et bien enclenché. Les syndicats de copropriétaires ont donc intérêt à se mettre à la page sans plus tarder.
Pour en savoir plus
Le RGCQ est un organisme sans but lucratif, créé en 1999, qui aide les copropriétaires, les administrateurs et les gestionnaires de copropriété à assurer une bonne gouvernance de leur immeuble. L'organisme prône la saine gestion et la bonne gouvernance en copropriété. Il veille à l’intérêt des copropriétaires et administrateurs, mais également à ce que les gestionnaires d’immeubles livrent des prestations respectueuses de l’éthique. L’entretien et la conservation du bâti représentent sa principale raison d’être.
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