On le sait, l’air intérieur est plus pollué que l’air extérieur. Le purifier grâce aux plantes ? Quelle belle idée! Le Web regorge d’articles qui font l’éloge des plantes pour purifier l’air de la maison. Mais qu’en est-il réellement ? Sans contredit, les plantes d’intérieur peuvent égayer nos vies. Ça fait des hits sur Instagram, rend nos salons plus attrayants, et on peut même réaliser de petits jardins intérieurs... mais le lien entre la qualité de l’air intérieur et les plantes est plus complexe à établir.
L’idée proviendrait grosso modo d’une étude réalisée par la NASA en 1989 et le Associated Landscape Contractors of America (l’Association des contracteurs en paysage)*, un groupe de commerce, réalisée dans les années 80 par le scientifique Bill Wolverton qui visait à déterminer des moyens de purifier l’air dans les stations spatiales (des environnements très petits et parfaitement étanches). L’étude concluait que les plantes constituaient une solution prometteuse économiquement à la pollution de l’air intérieur…. Si l’homme devait un jour aller vivre dans des petits habitacles clos, dans l'espace !
Évidemment, nos maisons sont loin, très loin, de ressembler à des stations spatiales. Premièrement, elles sont beaucoup plus grosses, et ensuite, elles ne sont pas parfaitement hermétiques : il y a des portes, fenêtres, de nombreux courants d’air, des fuites... qui permettent des échanges d'air avec l'extérieur. *Traduction libre de l'anglais.
Le pouvoir purificateur des plantes (en absorbant l’air avec leurs feuilles et leurs racines, certaines plantes peuvent éliminer des gaz nocifs, comme le formaldéhyde, les componsés organiques volatiles (COV), le benzène, l’ammoniac, l’ozone…) n'est pas à remettre à doute. Le problème ? Des journalistes, rédacteurs, blogueurs se sont à travers les années emparés de la recherche effectuée par la NASA (dans un environnement contrôlé aux paramètres bien précis), et ont transposé les résultats dans des contextes « hors-contexte ».
En réaction, l’Environmental Protection Agency (EPA) a effectué ses propres études. L'agence a déterminée que pour atteindre le même taux de dépolluant que dans les études en chambre de la NASA, il faudrait plus de 680 plantes dans une maison classique de 1 500 pi2… ce qui pourrait résulter en une jungle intérieure au taux d’humidité extrêmement élevé. Sachant que l'idéal pour éviter des problèmes de moisissure est de viser un taux d’humidité entre 40-50 %, une jungle intérieure pourrait devenir vraiment très problématique !
Selon l'étude de l’EPA, si un système de ventilation peut faire entrer de l’air frais dans la maison, les plantes deviennent complètement superflues pour jouer ce rôle de purificatrices.
Les résultats obtenus par l'EPA ont été confirmés par de nombreux chercheurs : Micheal Waring, de l’université Drexel, Richard Corsi, un chercheur spécialisé dans la pollution de l’air, Elliot Gall, de l’université Portland State… pour n'en nommer que quelques uns ! Waring et ses collègues ont par exemple procédé à une analyse de 195 études examinant les plantes d’intérieur et leur pouvoir filtrant. Verdict ? Oui, certaines plantes éliminent mieux les COV que d’autres, mais mises dans de grandes pièces, leurs effets sont pratiquement nuls. Selon cette analyse, il faudrait encore plus de plantes que le taux déterminé par l’EPA, soit 1 000 plantes dans un espace de 10 pi2 pour obtenir un changement d’air équivalent à celui effectué par un système de ventilation classique. Un système plus performant équivaudrait à encore plus de plantes !
André Fauteux, éditeur du Magazine La Maison du 21e siècle, a discuté avec le chercheur de la NASA BC Wolverton : « Dans notre dossier d’hiver 2010, l’ancien expert de la NASA BC Wolverton admettait que la réduction des polluants à la source et la ventilation ont un plus grand impact dépolluant que l’usage des plantes. L'impact des plantes est surtout notable dans un bâtiment parfaitement étanche et non ventilé, bref dans une capsule spatiale ! »
Conclusion ?
Il est indéniable que les plantes sont capables d’éliminer des toxines chimiques présentent dans l’air, mais la science n’a pas encore pu démontrer que c’est efficace dans la maison. Pour le moment, on adopte donc les plantes parce qu’on les aime, et pour un air intérieur plus sain, on suit les lignes directrices d’Écohabitation :
- Comment améliorer la qualité de l'air intérieur dans sa maison?
- Oui aux produits et matériaux sans COV ni urée-formaldéhyde
- Une bonne ventilation pour renouveller l'air frais
- L'importance des ventilateurs d’extractions dans les salles de bains et les cuisines
- Non aux parfums d’ambiance
- Non aux meubles et produits avec retardateurs de flammes
- Les produits ménagers sains : faits maison, avec Eco-logo ou Greenseal
- Protéger l'air intérieur lors des épisodes de fumée des feux de forêt
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