Le 29 avril dernier, le gouvernement du Québec a adopté le Code national de la plomberie (CNP) 2010 et intégré de nouvelles exigences en matière de consommation et de qualité d’eau, applicables au Québec dans le Code de construction, chapitre III, Plomberie.

De quoi parle-t-on exactement ? D’économiser et de préserver l’eau ! Cette nouvelle édition du chapitre Plomberie du Code de construction du Québec est une réponse à la Stratégie québécoise d’économie d’eau potable de 2011. Dès aujourd’hui, toutes les nouvelles installations de plomberie devront répondre à ces nouvelles exigences.

Écohabitation propose donc un tour d’horizon de la situation, de ce qui va changer et des défis à relever. Municipalités, vous êtes concernées !

Pourquoi économiser de l'eau ? État des lieux en chiffres.

Le Québec est une des régions qui consomme le plus d’eau au monde, avec 386 litres d’eau potable consommée par personne chaque jour en 2009.

tableau sur la consommation d'eau
© Émilie Piaguet  - Calculs effectués à partir des données d'Environnement Canada.

Note : La consommation d’eau comprend toutes les utilisations de l’eau municipale à des fins résidentielles. Les tableaux ne  comprennent pas la marge d’erreur des personnes non desservies en eau courante au Québec. Ils sont basés sur le total de la population québécoise en 2009.

Le vif du sujet : les nouvelles dispositions du Code en matière de gestion de l’eau

Les nouvelles dispositions du CNP 2010 visent principalement la réduction de la consommation d’eau et les risques de contamination par le radon, le plomb ou les produits chimiques. Écohabitation a identifié comme majeure la mesure 2.6.1.6. Dispositif de chasse, limitant la consommation d’eau des chasses de toilettes et urinoirs, mais voici un tour d’horizon de quelques mesures règlementaires écologiques que nous avons classées et élucidées pour vous.

     1. Réduire sa consommation

facteur de réduction de la consommation d'eau
© Émilie Piaguet
*Dispositions règlementaires obligatoires sous condition d’installation.

     2. Éviter la contamination

facteurs de contamination de l'eau
© Émilie Piaguet
*Dispositions règlementaires obligatoires sous condition d’installation.

Pour faire respecter ces nouvelles normes, la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) prévoit émettre des licences pour n’autoriser que les professionnels qualifiés et certifiés à effectuer les travaux de plomberie. Elle procèdera également à des évaluations régulières côté technique pour les cas de plaintes ou encore de dossiers inhabituels. Dans ce cas, la RBQ prendra des mesures spéciales pour une vérification plus sévère des systèmes installés.

    ► Voir toutes les modifications du Québec au CNP 2010

Quelles conséquences pour les municipalités ?

Ces nouveaux principes apportés par la règlementation vont améliorer la durabilité des bâtiments, tout comme l’avait fait en 2012 le nouveau règlement du Code de construction concernant l’efficacité énergétique (voir notre dossier sur la question). Grâce au leadership du gouvernement provincial et à ses nouvelles exigences au Code de construction, les citoyens et les municipalités vont bénéficier des avantages environnementaux et financiers de ces mesures.

Il faut noter qu’un certain nombre de municipalités avaient pris l’initiative dans ce domaine : les règlements de construction municipaux obligeant l’installation de toilettes à chasse de 6L maximum, aussi bien que leurs subventions, fleurissaient déjà un peu partout au Québec. Dès maintenant, les conseils municipaux de ces municipalités devront planifier la révision de certains paragraphes de leurs règlements de construction et leurs subventions s’il y a lieu. C’est une opération nécessaire en vue de respecter la conformité du Code de construction provincial. Pourtant, il faut voir cela comme un avantage, puisque ces municipalités avant-gardistes n’auront plus à exiger ce genre de normes (toilettes à chasse 6L), mais pourront les renforcer.

Ainsi, il serait bénéfique pour les municipalités de fixer des normes plus sévères, tel qu'un litrage maximal inférieur à la norme provinciale (maintenant 6L) pour les toilettes, ce qu’Écohabitation avait déjà recommandé auparavant. En effet, il est possible pour une municipalité d’imposer des toilettes ayant un débit moyen, inférieur ou égal à 4,8 L/par chasse ET être conforme aux exigences nord-américaines pour les toilettes (Uniform North American Requirements), selon lesquelles une toilette doit évacuer complètement 350 g de déchets solides en une seule chasse.[1].Le coût de ce système n’est pas tellement plus onéreux et se trouve très bien sur le marché !

C’est en présentant des solutions encore plus écologiques et abordables, comme celle-ci, que les municipalités pourront mettre de l’avant leur volonté environnementale… et faire de belles économies dans les coûts d’approvisionnement et d’assainissement de l’eau.

Étude de cas : Laval, une subvention qui marche !

entrevue avec Mme Raymond
© Entrevue effectuée par Émilie Piaguet

Le point de vue d'Écohabitation, avec Sara Finley

1. Que penses-tu du fait que le gouvernement concrétise enfin ses mesures pour l’économie d’eau potable ?

Il était temps ! Le Québec est un des grands consommateurs d’eau au monde, et nous n’avions toujours rien fait. Aussi, nous sommes en retard comparativement aux autres provinces canadiennes qui ont depuis déjà quelques années, obligées des mesures strictes comme les toilettes à chasse 4,8L.

2. Cette avancée réglementaire est-elle satisfaisante, ou encore bien trop timide ?

Je pense qu’il y a des efforts à faire pour que le Québec réduise significativement sa consommation d’eau. Nous avançons à petits pas car notre population démontre une certaine résistance face au changement. Le mythe de l’abondance de l’eau est encore d’actualité alors que ce n’est plus vrai.

Par exemple, la taxe sur les gros consommateurs est minuscule par rapport à ce que ça coûte pour distribuer cette eau et la recycler, d’autant plus que la nouvelle taxe pour les ICI (industries, commerces, institutions) n’arrivera qu’en 2017.

3. À ton avis, quels sont les avantages majeurs qu’apporteront les nouvelles mesures règlementaires pour les citoyens, la municipalité et les professionnels ?

Pour les citoyens, elle permettra de les conscientiser sur la valeur de l’eau sans forcément les facturer. Ces mesures seront un objet de sensibilisation à travers la construction et l’achat de technologies écologiques.

Pour les professionnels, il s’agit seulement d’une valeur économique puisque leur but est avant tout de réduire leur coût, ce qui va de pair avec la consommation d’eau potable.

Pour les municipalités, les avantages seront à la fois économiques, grâce à la réduction des coûts d’approvisionnement; sociaux, car ça va créer des emplois; et environnementaux, car il y aura moins de rejets.

4. Selon toi, comment va se faire l’adaptation des municipalités en général ? 

Les municipalités disposent de beaucoup d’outils livrés par le gouvernement pour gérer la  situation. On oblige maintenant les municipalités à établir un bilan annuel de leur consommation, ce qui leur donne déjà des informations précieuses et régulières pour une bonne gestion.

Également, l’obligation de facturer les ICI dès 2014-2015 fera avancer les choses. Pourtant, les mesures ne sont pas encore assez fortes puisqu’on cible une réduction provinciale de 20%. Ce n’est pas comme si nous avions exigé un montant maximum fixe.

5. Certaines municipalités avaient déjà pris l’initiative d’instaurer des règles d’économie d’eau dans leur règlementation. Comment penses-tu qu’elles réagiront ? Vont-elles être plus ambitieuses ou annuler leur initiative ?

Je pense que le bilan qu’on fait les municipalités quant à leurs diverses mesures est positif. Dans un sens, elles s’encouragent d’elles-mêmes à établir d’autres normes en voyant les coûts reliés diminuer. Bien sûr, ça dépend du type de programme : parfois certains sont moins bien gérés que d’autres.

Ce qu’il faut, c’est une appropriation des programmes de gestion par les municipalités et une bonne mise en œuvre pour que ça marche.

6. Quel conseil donnerais-tu aux municipalités afin d’inciter les résidents à réduire leur plus grosse consommation d’eau ?

Avant tout, il est nécessaire d’identifier le problème de consommation locale : est-ce qu’on doit réduire la demande moyenne en eau ? Ou alors est-ce qu’on vise la demande de pointe ? Les outils de bilans annuels sont justement là pour les aider à identifier ce problème et les guider.

Deuxièmement, il faut établir un programme solide et adapté aux réalités qui se gère bien. La solution technologique est toujours la meilleure à envisager, c’est-à-dire celle d’imposer une mesure fixe comme un appareil spécifique – par exemple des toilettes à 4,8L.

Je conseille aussi de sensibiliser les citoyens parallèlement au programme pour ne pas créer d’étonnement; c’est toujours important de faire de la promotion.

Stratégie québécoise d'économie d'eau potable - Petit rappel

La Stratégie québécoise d'économie d'eau potable créée par le Ministère des Affaires Municipales, des Régions et de l’Occupation du Territoire (MAMROT) a été mise en application dès 2011, dans la foulée des engagements gouvernementaux de la Politique nationale de l’eau adoptée en 2002.

Elle prévoit depuis 2006 un système de redevances pour les plus grands consommateurs d’eau au Québec. Chaque dollar récolté est placé dans le Fond vert du gouvernement du Québec qui, au 1er janvier 2011, avait rapporté environ 9 milliards de dollars pour l’année. Rappelons que ce système permet de financer les initiatives environnementales des municipalités et des organismes sans but lucratif.

De plus, la Stratégie d’économie d’eau potable vise à contrer les pertes d’eau causées par les fuites dans les réseaux d’acheminement municipaux et à limiter la consommation abusive de la ressource. C’est pourquoi le gouvernement québécois propose une série de mesures concernant les politiques et lois, mais aussi directement les organismes municipaux.

La refonte complète du système de gestion des eaux dans les bâtiments encadré par le Code de Construction du Québec fait l’objet du 2e engagement gouvernemental et touche donc le Code National de la Plomberie.

Outils pour en savoir plus

- Code de construction du Québec

Corporation des Maîtres Mécaniciens en Tuyauterie du Québec  (CMMTQ)

- Régie du Bâtiment Québec  - section Plomberie

- Stratégie québécoise d'économie d'eau potable

 

Sources:

[1] LEED Canada pour les habitations, 2009, crédit pour la Gestion efficace de l’eau, GEE 3.2 h

- Corporation des maîtres mécaniciens en tuyauterie au Québec (CMMTQ). (2013, le 12 mars). À venir : nouveau Chapitre III – Plomberie du Code de construction du Québec. Consultation publique du projet de règlement en cours.

- Environnement Canada. (2011). Rapport 2011 sur la consommation de l’eau par les municipalités.

- Loi sur le bâtiment. (2014). RLRQ c B-1.1.

- Régie du Bâtiment du Québec (RBQ). (2014). Lois, règlements et codes: Plomberie.

- Régie du bâtiment du Québec (RBQ). (2014, 24 mars). Modifications du Québec applicables au Code national de la plomberie Canada 2010.

- Régie du Bâtiment du Québec (RBQ). 2014. Nouveautés du prochain chapitre III, Plomberie, Code de construction 2010 et retour sur certaines exigences actuelles du code.

- Statistiques Canada. (2013, 25 novembre). Tableau : Population par année, par province et territoire (nombre).