Un portrait environnemental des grandes villes canadiennes a été récemment dressé dans une étude réalisée par Sumeet Gulati, professeur associé en Économie de l’Environnement et des Ressources à l'Université de Colombie-Britannique (University of British Columbia), et Juan Fercovic, diplômé de la même université. Ce portrait est plutôt satisfaisant pour les Québécois. Vous devinez pourquoi?
Gaz à effet de serre domestiques: de quoi parle-t-on?
Pour la comptabilisation des données, l’étude Comparaison des émissions de gaz à effet de serre des ménages dans les villes canadiennes (Comparing household greenhouse gas emissions across Canadian cities), a pris en compte les émissions directes des ménages, soit leur consommation d’essence, de gaz naturel et d’électricité. Ces trois sources sont considérées comme comptant la presque totalité des émissions directes d’un ménage moyen. Les données traitées dans l'étude datent de 2009.
Soulignons que les émissions indirectes pèsent tout de même pour deux tiers des émissions totales des ménages: il s’agit des émissions relatives à la production des biens et services consommés par le ménage. On lit donc en filigrane que les choix de consommation locaux ont un potentiel de réduction considérable des émissions de GES des ménages.
Montréal, première du podium: les raisons de l’exemplarité
Les résultats montrent de beaux contrastes: Montréal est à l’origine des plus faibles émissions parmi les ménages des métropoles canadiennes, avec 5,4 tonnes de CO2 en moyenne par année. Vancouver se classe seconde avec 7,6 tonnes et Winnipeg est troisième avec 8.1 tonnes. Edmonton est la plus grande émettrice, affichant 20,7 tonnes annuelles par foyer.
Notons d’abord une similarité dans les émissions provoquées par les véhicules à essence des ménages. Pas de fierté particulière à avoir de ce côté-là donc.
Pour les autres sources d’émissions, pas d’autosatisfaction trop rapide non plus. Les habitudes des citoyens ne sont probablement pas à l’origine de ces écarts importants, annonce Sumeet Gulati, professeur associé à l'Université de Colombie-Britannique, l’un des auteurs de l’étude.
On peut le constater: la source d’énergie utilisée pour le chauffage joue pour beaucoup dans la balance! Ainsi, les bons résultats de Montréal découlent directement de sa source d’énergie principale, l’hydroélectricité. Pour rappel, l’impact environnemental de l’hydroélectricité est 70 fois moindre que celui du thermique – charbon. À titre de comparaison, produire 1 kWh d’électricité, il en coûtera 6 g éq. CO2 à l’atmosphère avec l’hydroélectricité et 878 g éq. CO2 avec le mazout, presque similaire au charbon (source: CIRAIG, cité par Hydro-Québec).
Ainsi, en termes d’émissions directes, les scores sont résolument déterminés par la province où les ménages résident. Une plus grande densité signifie que les gens dépendant moins de leur voiture, et qu’ils vivent probablement dans de plus petites habitations, les températures influencent la quantité d’énergie pour chauffer les résidences, et le coût environnemental des types d’énergie disponibles dans la province décide pour beaucoup du total des émissions directes.
Edmonton et Calgary, pour leur part, cumulent les désavantages: non seulement leur climat est rigoureux, mais elles présentent une basse densité urbaine et surtout, elles ont encore recours massivement au charbon pour produire de l’électricité.
Un avenir plus vert dans les villes?
Pendant que les villes débattent de leur performance environnementale respective, l’étude de Gulati et Fercovic a une bonne nouvelle pour les Canadiens: entre 1997 et 2009, les émissions ont chuté, selon Gulati. Les ménages canadiens ont occasionné globalement 16 % de gaz effet de serre en moins, et on peut s’attendre à ce que cette tendance se perpétue.
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©Gulati et Fercovic, 2016 |
Villes québécoises: amplifier la réduction des émissions
Pour conclure, Gulati relève que l’étude a permis de souligner l’importance de la politique provincial en termes de réduction des émissions. « Les politiques jouent un grand rôle. Les décisions de nos gouvernements déterminent au final notre impact environnemental, en fonction du lieu où nous vivons », explique-t-il. « Il ne s’agit pas tant de nos choix individuels, mais plutôt du choix de notre société en termes d’approvisionnement en énergie.» Par exemple, l'Alberta, avec sa future taxe sur le charbon, peut être cité en exemple.
Si l’on devait se prononcer sur les résultats de Montréal, on ajouterait que le travail sur la planification urbaine et le soutien du développement des transports en commun devraient pouvoir permettre d’améliorer le score environnemental relatif à la grande utilisation de l’automobile. Du côté des automobiles qui restent en circulation, les tendances du marché affichent que celles avec un faible taux d’émissions de GES devraient prendre de plus en plus le pas sur les plus émettrices.
Par ailleurs, la consommation énergétique des bâtiments, provenant de l’hydroélectricité, doit demeurer un cheval de bataille, car, même si elle est à l’origine d’une quantité d’émissions relativement modérée chez les ménages par rapport aux autres provinces canadiennes, elle joue tout de même un rôle déterminant dans la gestion de la pointe hivernale.
Enfin, si les émissions de GES issues des déchets domestiques organiques ne sont pas comptabilisées dans l’étude, elles représentent tout de même une part non négligeable de la question:
- les matières végétales représentent 36 % du total des déchets produits par les ménages montréalais (source: Ville de Montréal)
- 38 % des ménages montréalais déclaraient composter en 2013, dont 48% à domicile et 45% dans le cadre d’une collecte porte-à-porte (source: Statistiques Canada)
- plus de 320 000 logements ont accès au service de collecte de résidus alimentaires depuis 2008. En 2017, près de 95 000 nouvelles adresses s’y ajouteront (source: Ville de Montréal)
La Ville de Montréal compte étendre le service de collecte des déchets compostables à domicile à tous les immeubles de huit logements et moins d'ici la fin de l’année 2019 pour un total d’environ 537 000 logements.
Soulignons que le potentiel d’économies d’émission de GES est de 148 à 222 kg Co2 éq. par personne annuellement grâce au compostage (source: Recyc Québec). En rapportant ces données à l’étude de Gulati et Fercovic, il serait possible pour les ménages de la Ville de Montréal de réduire leurs émissions moyennes de 5,4 tonnes de CO2 à 5 tonnes annuelles, soit une réduction de 8,5% environ.
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