Radon : les constructions récentes sont plus à risque !

Avec un taux de concentration moyen de gaz radon très élevé, les maisons neuves canadiennes sont les troisièmes plus contaminées au monde. Une étude réalisée par des chercheurs de l'Université de Calgary et publiée en novembre 2021 dans la revue Nature, révèle que les niveaux moyens de ce gaz mortel dans les nouvelles maisons au Canada sont 467 % plus élevés qu'en Suède ─ alors que la géologie et le climat de ce pays ressemblent beaucoup à ceux du Québec ! Pourquoi les maisons récemment construites sont-elles plus à risque ? Comment savoir s'il y a du radon chez soi ? Comment faire pour l'atténuer ? Les réponses dans cet article.

Concentration de radon en forte hausse dans les habitations canadienne de 1980 à 2020

Si rien n’est fait d’ici 2050, la concentration moyenne augmentera de 25 % dans les maisons au Canada, c'est ce que révèlent les modèles mis en oeuvre par une équipe multidisciplinaire de l'Université de Calgary, composée d'architectes et de chercheurs en cancérologie. Ces résultats frappants ont été partagés dans la publication intitulée Exposition au gaz radon en augmentation au Canada et en diminution en Suède, causée par les pratiques de construction résidentielle des 20^e et 21^e siècles.

Pour réaliser leur étude, les chercheurs ont eu recours à des outils d'intelligence artificielle pour analyser les tests de radon à long terme dans plus de 25 000 propriétés résidentielles canadiennes et 38 000 propriétés suédoises construites depuis la Seconde Guerre mondiale. Voici les résultats marquants :

• la tendance révélait des niveaux de radon plus importants dans les maisons suédoises avant les années 1980
• la tendance s'est inversée depuis 1980 : les niveaux de radon ont augmenté constamment dans les 4 dernières décennies au Canada, alors qu'ils ont diminué en Suède
• le niveau moyen de radon résidentiel canadien augmentera à 176 Bq/m3 d'ici 2050 si aucun changement n'est apporté à la règlementation
• les causes de ce changement sont complexes : nous le savons, on ne peut établir de carte des zones à risque en ce qui concerne le radon, et aucun événement unique n'est responsable de la réduction ou de l'augmentation du radon dans les deux pays.

Concentration de radon : le code du bâtiment en cause

Les chercheurs supposent que les changements dans les tendances de conception et ou les codes de construction sont à l'origine de cette augmentation significative du radon au Canada. « Il est important de reconnaître que l'exposition prévalente et dangereuse au radon est un problème relativement récent, d'origine humaine, qui prend racine dans la conception de notre environnement bâti », déclare Joshua Taron, doyen associé et professeur associé à l'École d'architecture, d'urbanisme et de paysage de l'Université de Calgary.

« Les pratiques de construction et de conception canadiennes des 40 dernières années ont produit des bâtiments résidentiels, commerciaux et industriels qui captent, contiennent et concentrent le radon à des niveaux non naturels et dangereux ». Joshua Taron, doyen associé et professeur à l'École d'architecture, d'urbanisme et de paysage de l'Université de Calgary.

En clair, l'étanchéité des nouvelles constructions contribuent à emprisonner le radon qui s'est infiltré dans la maison au travers des fondations et par les puits artésien. Les mesures de performance énergétique imposées par le code de construction dans les années 2010 n'ont pas été accompagnées de mesures assez sévères en matière de protection contre le radon.

Le Québec rattrape son retard pour atténuer le radon

La règlementation en vigueur au Québec est encore à ce jour quatre fois moins sévère que la norme du Canada. En effet, le Code de construction du Québec appliqué depuis 2015 utilisait toujours l’ancienne norme de 800 becquerels par mètre cube (800 Bq/m³), alors que la norme est passée à 200 Bq/m³ partout au Canada depuis plusieurs années.

Heureusement, le Québec est sur le point de rattraper son retard en modifiant son code de construction du Québec pour le Radon : le 24 novembre 2021, la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation annonce que la Régie du bâtiment du Québec (RBQ) rehausse certaines exigences en matière de construction afin de mieux protéger les Québécois contre l’infiltration du radon.

L’adoption récente de modifications au chapitre Bâtiment du Code de construction permet de réduire le seuil de concentration de radon maximale dans l’air en référant à celui établi par Santé Canada, passant ainsi de 800 à 200 becquerels par mètre cube (Bq/m3).

De plus, afin de s’assurer de l’uniformité d’application, la RBQ publie un deuxième règlement pour consultation dans l’objectif d’étendre ces nouvelles dispositions à l’ensemble du territoire québécois (rappelons que depuis 2019, les mesures contre le radon au Québec étaient encore limitées aux zones à risque). Ces modifications s’appliqueront à tous les nouveaux bâtiments assujettis à la RBQ.

« Il est urgent d’agir, selon Aaron Goodarzi. Au cours des 20 dernières années, 100 000 Canadiens qui n'ont jamais fumé ont reçu un diagnostic de cancer du poumon, et on pense que la principale cause de ces maladies est l'exposition au radon. » Et cette hypothèse semble tout à fait justifiée, puisque près d’une maison québécoise sur cinq testée présente un taux de radon trop élevé.

Les résultats de cette étude albertaine sont alarmants, mais les Québécois sont de plus en plus sensibilisés au problème du radon dans les maisons. La vente des tests de radon a explosé : l’Association pulmonaire du Québec (APQ) a vendu près de 20 000 dosimètres en 2020-2021, soit quatre fois plus qu’il y a deux ans. Et vous, avez-vous fait votre test ?